Le tourisme communautaire, une autre manière de voyager et de protéger la planète.

Par Liliana Chiocci, coopérante internationale en Equateur

Actuellement, le tourisme est considéré comme une activité polluante et destructrice des ressources naturelles Mais existe-il une autre manière de voyager qui peut compenser ces inconvénients?

tourisme de masse en chine

Avec l’arrivée des vols « low cost », à la fin du 20 éme siècle, les gens ont commencé à voyager de plus en plus en avion vers des destinations de plus en plus lointaines pour des courts séjours et plusieurs fois dans l’année. L’avion est devenu le moyen de transport privilégié des touristes, même pour des destinations proches, car plus rapide et souvent même moins cher que le train ou la voiture. C’est une des raisons pour lesquelles le tourisme est considéré comme un gros pollueur de la planète. 

Impact du tourisme

tourisme dans le désert: piscine en pleine oasisL’activité touristique ne pollue pas seulement à cause du transport mais aussi dans l’utilisation excessive de l’énergie, renouvelable ou non, pour chauffer ou refroidir les logements (même en cas d’absence). Elle est aussi responsable du gaspillage des ressources en eau même dans des régions où sévissent des sécheresses comme en Afrique ou dans le sud de l’Europe. La population locale en est la première affectée. Les hôtels ne sont soumis à aucune restriction continuant à remplir leur(s) piscine(s) ou arroser leurs jardins de fleurs et terrains de golf. Alors que les populations locales n’ont pas assez d’eau potable pour leurs besoins primaires, ni d’eau pour  l’agriculture ou l’élevage.

Tourisme: Ne voyager plus comme ça

Soucieux de préserver la planète en évitant les voyages en avion, faut-il pour autant délaisser les destinations lointaines, bien souvent des pays en voie de développement dont, selon les gouvernements, une grande partie de l’économie dépend du tourisme ?

Tout d’abord, il est indiscutable que les revenus du tourisme traditionnel ne bénéficient pas  réellement aux populations locales. On peut s’en rendre compte près de chez nous en Europe du Sud. Le tourisme de masse s’approprie des ressources naturelles, bénéficie d’avantages fiscaux, accapare les budgets de l’État pour améliorer les infrastructures telles que les routes d’accès aux complexes hôteliers. Il est également responsable des déplacements de populations qui doivent laisser la place aux infrastructures touristiques principalement financées par des grands bailleurs de fonds étrangers. Dans ces conditions, on constate très peu de retombées pour la population locale. S’il y a création d’emplois, ce ne sont bien souvent que des postes mal rémunérés ou au salaire minimum. On peut donc finalement se demander si le tourisme est réellement un moteur de l’économie locale ou s’il est plutôt une cause d’appauvrissement supplémentaire des populations locales en détruisant leur environnement et en exploitant leurs ressources.

Les certificats de tourisme durable

greenwashing dans le Tourisme

Le monde étant de plus en plus conscient des dérives de ce type de tourisme en matière d’environnement et de développement durable que des systèmes de certification écologique ont été mis en place. Il s’agit souvent d’une manière courante de faire du greenwashing ou de se déculpabiliser. Par exemple, les hôtels diminuent le nombre de lavage des draps de lit ou des essuies, mettent des économiseurs d’eau dans les toilettes ou dans les douches, utilisent des panneaux solaires, recyclent les déchets, soutiennent une initiative locale, etc. Mais sont-ils en réalité plus écologiques ou plus durables pour autant ? Ils ont de toute façon les moyens de se payer les fameux certificats écologiques. Ils sont au départ très pollueur. Ces initiatives ne font que diminuer, en partie, le gaspillage de ressources mis en place pour créer leur activité économique. 

Le tourisme communautaire

Tourisme local: elaborar tortillas de maíz

En opposition au tourisme de masse, nous avons le tourisme communautaire, un tourisme alternatif aux retombées positives, tant auprès de la population locale, qu’au niveau de l’environnement. En effet, Il s’agit d’un tourisme, plus authentique et pour de petits groupes, qui vient en complément des activités traditionnelles comme l’agriculture, l’élevage, la pêche ou l’artisanat que pratiquent les populations locales des zones rurales.

Le tourisme communautaire se base principalement sur la mise en valeur du patrimoine tant naturel que culturel tel que le territoire ancestral ou les traditions transmises de génération en génération. L’administration et la gestion de ce type de tourisme sont directement prises en charge par la population locale via des comités ou des associations communautaires. Cela fonctionne un peu comme des coopératives où il n’y a pas de patron mais où tout le monde a sa propre responsabilité. Certains seront donc responsables de l’administration, d’autres seront guides, tant les hommes que les femmes, certains prennent en charge l’hébergement ou la préparation des repas. Mais tout le monde participe aux travaux communautaires comme l’aménagement du territoire ou des infrastructures, l’entretien des sentiers, la propreté dans le village ou la préservation de l’environnement. Quand il y a des touristes, il existe une répartition équitable des tâches et donc des rémunérations. Ainsi, tout le monde a sa chance de participer à l’activité touristique et donc d’améliorer ainsi son expérience de travail et ses revenus.

Tourisme: Albergue comunitario de San Francisco de Paján

Le tourisme communautaire est souvent critiqué par ses détracteurs comme étant un tourisme de mauvaise qualité ou peu confortable. Or, en général, il s’agit d’un tourisme de privilégiés en comparaison avec le tourisme de masse où vous êtes noyés parmi des centaines de touristes. Par contre, dans une communauté (village rural), vous êtes souvent en petits groupes. Vous avez pratiquement à votre service tout un village où chaque habitant est fier de vous recevoir et de faire en sorte que vous passiez un chouette séjour pour autant que vous soyez curieux et respectueux de leur mode de vie.   

 

Un tourisme plus responsable

D’un point de vue écologique, les propositions de tourisme communautaire sont certainement beaucoup plus écologiques et durables que celles des hôtels certifiés écologiques. En effet, les constructions, là où vont loger ou se restaurer les touristes, sont souvent soit un logement chez l’habitant amélioré, soit des logements typiques fabriqués avec du matériel local. Les infrastructures sont agréables, juste ce qu’il faut, sans luxe. Ils utilisent encore des méthodes traditionnelles de ventilation pour maintenir leurs habitations fraîches ou les préserver du froid extérieur. Ils n’utilisent donc pas de grandes quantités d’énergie électrique et utilisent presque partout des ampoules LED. Il n’y a pas spécialement besoin de recyclage des déchets car il n’y en a pratiquement pas. Les déchets organiques sont soit compostés, soit servent d’alimentation aux animaux des fermes. Le plastique ou les produits emballés, qui chez nous proviennent de la grande distribution, sont pratiquement inexistants car la population se nourrit principalement de sa propre production.

Le cas du tourisme communautaire à Manabí

Tourisme: en casas viejas sendero zona de descansoSi nous prenons le cas de l’Équateur, spécifiquement dans le sud de la province de Manabí, nous trouvons un exemple intéressant. En 2013, à la demande de l’Union provinciale des organisations paysannes de Manabí (UPOCAM), un projet de tourisme communautaire a été lancé au profit de dix communautés villageoises de deux municipalités: Jipijapa et Paján. L’objectif principal a été de développer de manière participative des propositions de tourisme communautaire qui mettent en valeur les traditions et revalorisent les populations paysannes en les impliquant à toutes les étapes. Grâce aux formations et aux activités de tourisme, les familles paysannes ont accédé à une certaine reconnaissance et sont devenues visibles et respectées au sein de la société équatorienne. 

Des communautés rurales s'organisent

Tourisme local: Mujer de Agua Dulce

Des femmes, des hommes, des jeunes et des personnes âgées ont appris à transmettre leurs traditions et leurs connaissances. Ils ont été impliqués dans la création d’activités touristiques et dans l’accueil des visiteurs, que ce soit chez eux ou dans des hébergements communautaires, en leur offrant des plats typiques locaux. L’un des principes fondamentaux du tourisme communautaire est d’éviter la restauration internationale et de promouvoir à la place des menus élaborés avec des produits locaux et suivant les traditions culinaires ancestrales. 

Cependant, l’arrivée de la COVID-19, en 2020, a radicalement changé la donne. La pandémie a entraîné une baisse significative du nombre de voyageurs dans le monde entier. Une fois que le tourisme a commencé à se redresser, bien que certains voyageurs aient opté pour des destinations locales, notre emplacement éloigné qui n’a pas été promu par les autorités locales souffre encore des conséquences de cette discrimination. Cela a été exacerbé ces derniers mois en raison de commentaires sur les réseaux sociaux ou de mauvaises interprétations d’événements politiques et sociaux dans certaines régions du pays. 

Wankatours une agence de tourisme communautaire

Agencia de TourismePendant ces années de suspension du tourisme, les communautés n’ont pas chômé. Elles se sont réorganisées et ont même créé leur propre agence de voyage de tourisme communautaire, Wankatours, une première en Équateur. En effet, la plupart des agences sont des entreprises privées, mais la nôtre est différente. En tant qu’entreprise communautaire, appartenant au Réseau de Tourisme Communautaire Jipijapa Wankavilka, l’agence est gérée par de jeunes professionnels issus des communautés. Durant cette période, notre agence a travaillé ardemment pour mettre en place des séjours adaptés. Elle propose maintenant des circuits de courte durée, de quelques jours, jusqu’à des circuits d’une à trois semaines permettant de découvrir les différentes régions de l’Équateur d’une manière alternative, en contact direct avec les populations locales. Ces séjours sont désormais accessibles à un public international, qui, comme nous l’avons constaté, est très intéressé par ce type de tourisme authentique

Des circuits touristiques alternatifs

Tourisme de café

Afin de promouvoir les propositions de circuits, nous organiserons une vidéoconférence via Zoom le jeudi 14 mars à 20h. Nous y présenterons notre prochain circuit de trois semaines, prévu en septembre 2024,  permettant de découvrir la région côtière, les Andes et l’Amazonie équatorienne. Au cours de ce voyage, les participants auront l’occasion d’explorer différentes cultures locales, notamment celles des paysans producteurs de la côte équatorienne, mais aussi les populations indigènes des Andes et de l’Amazonie. 

En plus de visiter les parcs nationaux terrestres et maritimes, d’observer la faune locale, comme les baleines à bosse, les tortues de mer, les condors, … , les participants auront l’occasion de déguster et de découvrir des plats typiques de la région, élaborés avec des produits locaux.  

Ballenas Jorobadas

La découverte des villes de Quito et Cuenca, du site archéologique d’Ingapirca, et de la ligne équatoriale, seront aussi au programme. Ensuite, la visite du parc national  du volcan Antisana ou l’accompagnement des marchands de glace jusqu’au glacier du volcan Chimborazo seront des moments inoubliables.

Une partie du voyage consistera également en une immersion en pleine Amazonie à la rencontre du peuple indigène de Sarayaku qui lutte depuis plus de 40 ans contre l’exploitation de leur sous-sol par l’État et les compagnies pétrolières. Le tourisme est devenu pour eux une alternative économique et un moyen de sensibilisation à leur lutte.   

tagua rocafuerte

 

Nous ne manquerons pas non plus de visiter un certain nombre d’artisans locaux pour découvrir leurs traditions. Ils réalisent leurs produits à partir de matériaux végétaux locaux tels que la paille, la tagua (l’ ivoire végétal),  mais aussi avec de l’or, de l’argent, du cuir, etc. 

Le voyage débutera à l’aéroport de Guayaquil et se terminera par un « City tour » de Guayaquil avant le retour en Europe. 

Nos circuits sont toujours personnalisés en fonction du groupe et de sa talle tant en durée qu’en itinéraire mas toujours en privilégiant le tourisme communautaire.

Pour en savoir plus

Pour plus de détails vous pouvez découvrir le site internet www.turismo-rural-jipijapa.org

Pourquoi ne pas oser le tourisme communautaire ? Parlons-en en découvrant la Red de Turismo comunitario Jipijapa Wankavilka et son circuit alternatif en Equateur pour découvrir le pays tout en favorisant le développement rural, lors d’une vidéo-conférence le jeudi 14 mars à 20h (heure de Bruxelles).

Si vous souhaitez participer à notre conférence virtuelle, le 14 mars 2024 à 20h (heure de Bruxelles), inscrivez-vous via notre formulaire :  https://forms.gle/j3t5ukqMn6zEcnP48

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